2024-05-17 — 2024-12-13

De retour à Delhi, j'essaie de jongler entre les bons moments d'exploration et les coups de stress écrasants, tout en préparant le mariage qui approche.

Carnet de voyage en Inde – Partie 6 : Des hauts et des bas

De retour sur la route

O

n est sur la route du retour vers New Delhi, avant de retourner à Aligarh pour le mariage (la raison principale de ma venue en Inde), mariage qui fera l’objet de la partie 7. Le reste du groupe compte rester dans le Vieux Delhi, dans le quartier de Paharganj, que le gouvernement français déconseille explicitement à cause de la criminalité. Les avis sur l’hôtel sont bons, mais probablement bidons. Difficile de savoir avant d’y être. Moi, je ne veux prendre aucun risque, donc je réserve un AirBnb dans un coin que je sais sûr : au sud de Delhi, près de là où on était dans la partie 4

Sur l’autoroute, avant d’arriver en ville, je revois le même gros tas de détritus qu’il y a quelques jours, quand on allait à Chandigarh. Curieux, je vérifie s’il est sur Google Maps, et bien sûr, il y est et il y a même des avis. Apparemment, la situation s’améliore, le tas diminue petit à petit. Mais l’été, il prend parfois feu. Imaginez vivre à côté.

Le trajet jusqu’à l’hôtel est assez long, Delhi est une ville embouteillée après tout. Quand on arrive à l’hôtel, ça n’a pas l’air si terrible que je l’imaginais. Mais j’ai toujours ma réservation, alors je demande à notre chauffeur de m’emmener au AirBnb. C’est « censé » prendre une demi-heure, d’après Google Maps. Mais la circulation est infernale, et on finit par mettre deux, voire trois fois plus de temps. Je me sens super mal pour VJ, qui va rentrer très tard. J’aurais dû prendre le métro…

Même dans un AirBnb avec une seule chambre, il y a de la paperasse. Le propriétaire a – vous l’aurez deviné – un Gros Carnet™️ sur lequel il note mon nom, mon numéro de passeport, etc. La configuration de l’appartement de mes hôtes est un peu bizarre : l’entrée est au rez-de-chaussée, il y a quelques pièces, et un escalier qui descend. Est-ce qu’ils vivent au sous-sol ?

Enfin seul, dans un endroit calme, la tension accumulée retombe. J’en ai marre de gérer les histoires des autres, ça fait deux semaines de stress quasi constant et de surstimulation, et pour couronner le tout, une migraine commence à pointer (c’est comme si moi aussi j’étais dans un sous-sol mental). J’en arrive même à imaginer prendre un avion et rentrer maintenant, et au soulagement que je ressentirais. Quoi qu’il en soit, je suis venu pour assister à un mariage, et c’est ce que je ferai.

Je m’allonge en écoutant un podcast, essayant d’oublier la douleur lancinante, et je finis par m’endormir comme ça.

Vieux Delhi

Douze heures plus tard – oui, douze – je me réveille sans douleur et en meilleure forme. Thé, musique. Les autres vont manger quelque part à Connaught Place, aussi connu sous le nom de Rajiv Chowk, une immense place circulaire. Je peux prendre le métro pour les rejoindre là-bas.

Quand j’arrive à Rajiv Chowk, je ne sais toujours pas dans quel restaurant on est censés se retrouver. On a des communications ultra-rapides à travers le globe, connectés par des appareils incroyablement puissants dans nos poches, et pourtant, ça n’a jamais été aussi compliqué de se coordonner ! Mais on finit par y arriver.

J’ai mes habitudes maintenant niveau nourriture, donc ce sera encore un Thali.

Après manger, le plan c’est d’aller au Fort Rouge. J’hésite : c’est hyper touristique, il va y avoir foule, et c’est dans le Vieux Delhi. Mais bon, je suis déjà là, autant y aller. C’est aussi près du métro, ce qui est pratique pour moi.

Dans la voiture, en chemin, VJ nous dit que l’endroit est assez galère d’accès, et qu’il vaut mieux prendre des rickshaws pour aller voir le Fort Rouge, la mosquée et le marché aux épices. On ne sait trop comment, on fait quasiment le tour complet du Fort Rouge avant d’atteindre le parking. VJ appelle ses amis, et quelques instants plus tard on se retrouve dans… même pas des rickshaws : simplement trois cyclo-pousses biplaces.

Plutôt gênant… Je me sens un peu honteux, ça rappelle un peu trop l’esclavage à mon goût. Je sais, ils sont payés et les locaux se déplacent comme ça aussi. Mais dans ces conditions… Le grand boulevard devant le Fort Rouge est bondé comme jamais, circulation quasi à l’arrêt, les gens traversent comme ils peuvent, les vélos slaloment entre tout le monde, le tout dans une joyeuse cacophonie de klaxons. C’est tellement proche de l’enfer et tellement absurde que ça en devient drôle !

Nos chauffeurs – nos… moteurs ? – ne nous emmènent pas au Fort Rouge, bien au contraire. On quitte le boulevard pour s’enfoncer dans le Vieux Delhi, que j’imagine juste comme une version encore plus infernale de Delhi (désolé si ça fait beaucoup d’« enfer », j’essaie juste de retranscrire l’émotion du moment).

Je ne pense pas avoir tout à fait tort, cela dit. C’est plus peuplé, plus pauvre, plus désordonné, probablement plus dangereux, et encore plus stimulant. C’est une chose de voir les gens de loin, ou certains taper à la fenêtre de la voiture pour mendier. C’en est une autre de faire partie de ce qui ressemble à un chaos inéluctable de ruelles étroites, et d’être si proche de gens vivant une vie si étrangère. Je ne le dis pas de manière péjorative du tout, je veux juste souligner le contraste saisissant, un contraste si grand qu’il vous prend à la figure, encore et encore.

On s’arrête à la mosquée, Jama Masjid. C’est… décevant, il n’y a pas grand-chose à voir ; ce n’est pas particulièrement beau. Au centre de la mosquée, il y a un bassin. Des gens semblent s’y « laver » les bras, d’autres puisent de l’eau avec leurs mains, la mettent en bouche avant de la recracher.

Pendant qu’on est là, A. me dit qu’il préférerait vivre dans la jungle plutôt qu’ici, même si ça signifiait se faire mordre par un serpent ou autre…

Retour à nos chauffeurs-cyclistes. On leur dit qu’on ne veut pas aller au marché aux épices, mais directement au Fort Rouge. On s’engage dans des rues étroites, où aucune voiture ne pourrait passer, jusqu’à rejoindre Chandi Chowk Road, qui doit être l’artère principale du Vieux Delhi. De là, comme tout est si chaotique, on marche simplement jusqu’au Fort Rouge, en traversant le boulevard où on était au début – une expérience intéressante.

Il est trop tard pour entrer, mais on peut quand même voir la belle façade. Je laisse les autres faire ce qu’ils veulent : moi, je prends le métro et je rentre !

Mais ce n’est pas si simple. Le distributeur de billets n’a plus de tickets papier. J’essaie l’appli : carte bancaire refusée. Alors je fais la queue au guichet. Certains doublent simplement la file et vont direct au guichet ; on dirait que les files d’attente ne fonctionnent pas pareil ici !

Détente

Le lendemain, je n’ai envie de rien faire de spécial, juste trouver un endroit sympa où petit-déjeuner. Ça tombe bien, je suis dans le sud de Delhi !

Ensuite, c’est juste balade, lecture et sport.

Et pour dîner, un bibimbap commandé sur Zomato, l’appli locale de livraison de repas.

Deux amis d’A. arrivent après-demain, et A. veut qu’un visage familier soit là à leur atterrissage. Mais lui et le reste du groupe ont prévu de retourner à Aligarh plus tôt. Ce qui veut dire que c’est moi qui vais m’en charger.

Aerocity

Le lendemain, après le check-out et le petit-déjeuner, je dois prendre le métro pour aller à l’aéroport. J’ai réservé une chambre d’hôtel, pour être à l’heure pour accueillir les amis d’A. quand ils atterriront le lendemain matin. Et oui, aussi parce que l’hôtel est plutôt sympa.

Encore une fois, acheter le billet de métro n’est pas simple. Je demande un billet pour Aerocity, mais le type au guichet me dit des trucs que je ne comprends pas, avec son accent épais, même en me concentrant à fond. Après quelques gestes, je finis par comprendre : je ne peux pas avoir de billet direct pour Aerocity. Il va me donner un billet jusqu’à la station où je dois changer, et je devrai acheter un autre billet là-bas. C’était simple, finalement.

Aerocity est un quartier flambant neuf avec des hôtels, des restaurants et des magasins, juste à côté de l’aéroport. Visuellement, ça pourrait être n’importe où sur la planète, mais ça fait toute la différence en venant de Delhi. Enfin, c’est ce que je vois en sortant du métro :

Ça pourrait être mieux, mais ça va s’améliorer une fois les infrastructures terminées. J’ai réservé une chambre à l’hôtel Aloft, qui est peut-être l’un des hôtels les plus luxueux où j’aie jamais séjourné.

La normalité et le confort offrent une pause bienvenue. Je peux juste me reposer, faire du sport à la salle de l’hôtel, et même nager un peu dans la piscine. On est en décembre par contre (« l’hiver »), donc l’eau n’est pas spécialement chaude, probablement autour de 12-14°C. Inutile de préciser que je n’ai vu personne d’autre dedans !

C’est extrêmement agréable de pouvoir faire du sport dans de bonnes conditions ! C’est assez difficile sinon de prendre soin de mon corps en voyage ici, que ce soit pour trouver la bonne nourriture ou pour faire assez d’effort physique.

Un très joyeux Noël

Au centre d’Aerocity, il y a une sorte d’esplanade piétonne, mi-parc mi-promenade, qui mène à un centre commercial, avec son aire de restauration, ses restaurants et ses bars. Aujourd’hui, c’est Noël – le premier que je passe seul. Il y a un marché de Noël dans le parc, qui ressemble à n’importe quel autre marché de Noël. L’ambiance est détendue.

Au restaurant, à la télé, il y a un sport que je ne reconnais pas. Quand je demande au serveur ce que c’est, il me dit que c’est du Kabaddi, un sport de contact indien, qui vaut le coup d’œil à mon avis (vidéo ici).


Le matin, après une autre séance de sport, je descends prendre le petit-déjeuner. C’est cher, mais ça vaut le coup : le buffet de petit-déjeuner le plus grand et le plus beau que j’aie jamais vu. Il y a des fruits, des gâteaux, des plats avec des pommes de terre, du riz, de la viande, plein de pains indiens, des céréales, du pain grillé, différents jus de fruits, des olives, du fromage. En plus de ça, on peut demander des œufs, des omelettes, des pancakes au chocolat, des gaufres… C’est comme un rêve devenu réalité.

Accueillir les nouveaux arrivants

Les amis d’A., appelons-les Julien et Claire, arrivent plus tard que prévu à cause du brouillard autour de l’aéroport. Je vois sur Flightradar24 qu’ils sont en circuit d’attente. Ce qui veut dire : plus de temps pour ce magnifique petit-déjeuner…

Je dois quand même finir par aller à l’aéroport. Après un peu d’attente supplémentaire (dehors, car il faut un billet d’avion pour entrer), ils arrivent. Comme la dernière fois, c’est un peu galère d’avoir un VTC Ola ou Uber, puis de trouver le chauffeur, mais on y arrive.

La route vers Aligarh est longue. Je discute avec Julien et Claire, j’essaie de leur donner une idée de ce qui les attend. Ils ne restent qu’une semaine, avant de reprendre l’avion pour l’Europe – juste pour le mariage. C’est drôle de les voir surpris par des choses auxquelles je commence à m’habituer ; même s’ils n’ont pas l’air plus impressionnés que ça.

Je me demande pourquoi. Est-ce parce qu’ils sont détachés de l’expérience, qu’ils ne la prennent pas à cœur ? Est-ce trop tôt ? Sont-ils moins sensibles ? Qui sait…

L’autoroute. Le chauffeur au téléphone. Puis le bout de route plus petite, qui traverse des villes. Rues animées, klaxons de camions, vaches mangeant des ordures, magasins de la taille d’un placard, gens qui vous sourient si vous leur souriez. Lenteur. Patience.

Environ trois – ou quatre ? – heures plus tard, on arrive à l’hôtel où le mariage aura lieu. Mais ça, c’est pour la prochaine partie ! À la prochaine.

N’abandonnez pas quand vous avez envie d’abandonner. Attendez d’abord trois jours.